• Êtes-vous une personne ?

    Ce que j'imite me limite. Car alors je me fixe un but, une forme qui me semble idéale et désirable. Mais je n'imite que la forme, qui n'est que l'ombre projetée de l'idée. La forme n'a pas de signification réelle. L'extérieur n'est pas vivant. Le gant n'est pas la main.

    Qui m’imite tend à me limiter, car il m’interprète selon sa propre limitation, me forme à son désir et me fige dans une représentation qui n’est rien de plus que l’image qu’il a de moi, selon les capacités de sa propre imagination, et qui peut peser sur la mienne. Il y a une interaction permanente entre moi et l’autre, qui rend encore plus difficile la réalisation de Qui je Suis.

    Les idoles, les stars, qui sont bien peu de chose les lumières éteintes, si elles n’ont pas la force de passer au-delà, ne se nourrissent que d’énergies serviles et très basses, qui en réalité les vampirisent par soustraction de la substance de leur image. Cela explique le nombre extrêmement élevé de suicides, drames, dépression et excès constatés dans ce milieu.

    Imiter c’est tendre à devenir l’image qui semble bonne. C’est suivre. Dois-je vouloir être bel et bon, selon mon propre curseur, qui varie sans cesse, en fonction des modèles rencontrés ?

    Quelqu’un me plaît. Je veux être comme. Commun. Con. Conforme.

    Quand je me conforme, ma forme devient commune. Comme une autre. Reflet. Plasma. Je perds donc toute possibilité d’Être.

    Il existe une tendance au mimétisme négatif : vouloir se différencier à tout prix. Pour un résultat identique.

    Je suis original lorsque je transmets dans ma forme la structure originelle de ma véritable forme, enfin pure de toute influence ou scorie, de toute attente, de toute crainte, de tout désir.

    Alors, étant devenu parfait, je peux exprimer la voix de l’Origine (étymologiquement : qui vient de la lumière), celle qui traverse le mur de la matière pour résonner comme par un tuyau – on dit maintenant un canal. Je suis alors enfin une Personne (per-sonnare).

    Toute imitation, tout mimétisme, tout désir de se fondre dans la masse par lassitude ou de se différencier par réaction doivent être bannis, tout désir de plaire, de se conformer à ce que l’autre attend de nous, tout cela doit être constamment débusqué et son énergie transmutée afin de laisser advenir à travers nous la voix et la lumière de l’Origine Eternellement Présente.

    Être beau n’est rien. Être bon non plus. Sage, riche, puissant, aimé, respecté, adulé, craint, suivi, apprécié, recherché, coté.

    De la rouille dans le tuyau. Attributs, guenilles. Fantômes, cadavres.

    Bouffe pour la lune, pour paraphraser Gurdjieff.

     

    Déjà publié le 18 janvier 2010.

     





  • Commentaires

    1
    zwyn
    Mardi 22 Avril 2014 à 11:32

    Ce texte tombe à pic pour moi. Car j'essayais de comprendre la théologie mystique  de Denys l'Aréopagite à travers le livre de Jean-Yves Leloup 'Un obscur et lumineux silence' que je lis en parallèle avec 'Les sept cité de l'amour' de Farid-ud-Din Attar. Je lis le tout à dose très homéopathique car j'avoue ne quasi rien comprendre ni à Denys ni à Attar. Denys qui pourtant a été le modèle de St Thomas d'Aquin. Et Attar au Sheikh ben Tounès. Mais force m'est de constater que mon intellect me limite très fortement ... et c'est tant mieux car il me rappelle qu'il me faut rester humble et avancer pas à pas, jour après jour.

    2
    elba
    Jeudi 24 Avril 2014 à 13:23

    Bonne petite piqure de rappel, VJ. Etre soi-même... ce n'est pas toujours aussi facile qu'on pourrait le croire.


    Merci à vous. ♥

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