• Moi qui vis en pleine cambrousse, je vois bien que le paysan est en passe de devenir l’une des composantes les plus détestées du paysage social.

    Détesté des citadins, car il vit encore à la campagne, qui est à l’origine de nous tous, et recèle encore des mystères presqu’oubliés.

    Détesté des fonctionnaires qui prolifèrent sur son échine : lui n’a pas trahi, et croit encore qu’on doit vivre de sa valeur, pas de rapine et de discours.

    Détesté des écolos, car, poussé par la nécessité (rembourser les banques et payer ses charges), et par l’endoctrinement, il n’a qu’une idée en tête : produire toujours plus.

    Détesté des fainéants, car il passe sa vie à bosser.

    Détesté des imbéciles et des incapables : il est intelligent et efficace.

    Détesté des rêveurs et des doctrinaires : il vit son rêve et éprouve sa doctrine à l’aune du réel.

    Détesté de ses frères et sœurs qui sont partis gagner en ville plus d'argent, plus de retraite, plus de cinéma et de plans cul, parce qu'il a parfois fini par se constituer un patrimoine.

    Je voudrais donner une idée de ce que je ressens, à son égard :

    Le mec dans son tracteur, souvent célibataire, détesté de tous et méprisé des femmes nourrit une foule de parasites directs ou indirects chargés de sa surveillance, de la gestion de son temps.

    Ça signifie qu'en raison des 35 heures, des obligations de formation, des cinq semaines de congé OBLIGATOIRES, des absences dues aux incroyables maladies qui fondent sur le pauvre fonctionnaire et sa malheureuse famille décomposée, hâtivement recomposée, comme autrefois la vérole sur le clergé, en raison des maladies, disais-je, qui le maintiennent cloué devant la télé plusieurs semaines par an, des grossesses des madame, des congés paternité, des aléa climatiques, des journées d'information, du temps de pause et de fraternité de classe au self, à la machine à café, de la lecture et de la discussion des niouz, sans même parler des grèves surprise, bref, pour surveiller cet increvable animal préhistorique, il faut environ 4 à 5 fonctionnaires à plein temps.

    De pleins bureaux d'inutiles diplômés qui établissent des barèmes, cochent des cases, épluchent des règlements, délivrent des permis, imposent des quota, des normes, aident le malheureux à remplir des formulaires par lesquels il renonce à toute initiative personnelle, le dissèquent, le toisent, le menacent, l'encouragent et le flattent tour à tour, du haut de leur minuscule puissance.

    Pour observer sans discontinuer et rogner les ailes de l'effrayant paysan capable de bosser 7 jours par semaine 15 heures par jour, 370 jours par an, et cela sans compter les brigades fiscales ni les contrôles routiers, il faut 4 à 5 personnes toutes pleines de rancune et de mépris envers lui, ce pollueur insoucieux de la survie de la planète et de l’humanité.

    Le paysan, lui, sauf dans les ennuyeuses périodes où, étranglé par les banques, les charges sociales et les coups de bourse des agioteurs, et peut-être le poids de cet ostracisme qu'il ressent, il se suicide, ce qui suscite l'émoi temporaire et enfin lucide de ceux qui sans lui mourraient de faim, faute d’avoir le moindre talent, le moindre courage, en dehors de ces crises fatales, le paysan se porte bien.

    Il est fier de son talent. Conscient de sa vigueur, de sa valeur. Conscient que les mouches qui lui tournent autour ne lui arrivent pas au genou. Mais ficelé sans recours.

    Sa fréquente brutalité n’est que de la franchise, face aux serpents qui l’entourent, aux sangsues qui le sucent.

    Cet esclave moderne, haï et méprisé par ceux qui profitent de lui, cette anomalie d'un monde croulant sous le poids des inutiles et des incapables continue à "produire", ce qui est une véritable faute de goût, même le mot fait dégueulasse, dans la brillante société aux pieds d’argile qu’on nous a imposé, où toute la gloire est dévolue aux escrocs.

    Avec notre accord, bien sûr. C'est le monde que nous acceptons.


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  • Ce qui me plait chez Ayn Rand, c'est le retour aux fondamentaux. Nous, humains mis sous contrôle presque total, vivons, pensons, cherchons notre respiration sous des tonnes de mélasse surajoutées, qui forment ce que l'on appelle : le tissu social.

    Corruption du message initial codant la créature humaine, née libre et unique, dû à un dévoiement pleurnichard du christianisme.

    Alain Daniélou rappelait que les religions "sociales" étaient de fausses religions. Le seul vrai culte étant dû au lingam, et à la yoni, c'est à dire le masculin, vertical (mot contenant la racine rté, vertu, puissance) et le féminin, champ d'application, réceptacle fécondant des possibles.

    Le reste est foutaise et mensonge.  En ce sens, Rand, comme Nietzsche sont des païens (proches de la source, pegai en grec ancien).

    Mais le Christ aussi est proche de la Source, et y réfère sans cesse. Il y a une interférence, dit-il - l'ivraie des évangiles - entre Elle et nous, le Tentateur, l'Adversaire, le Prince de ce monde, le Père du mensonge.

    Ayn Rand appelle cette interférence : les Pillards.

    Je sais qu'il paraîtra curieux de rapprocher Ayn Rand, juive extrémiste assoiffée de liberté individuelle, Nietzsche, obsédé de pureté et de rigueur, du message du Christ, extrémiste galiléen fondant son enseignement sur l'amour et la foi.

    C'est ma propre liberté de penser et de voir des liens, et d'exister, sans devoir rendre le moindre compte à une quelconque autorité auto-reconnue; à quiconque, en fait.

    Quand on se donne les moyens de descendre, par des pratiques appropriées, souvent déconseillées voire interdites par le sens commun et le législateur à la racine de l'Être, on y fait  plusieurs découvertes.

    Dont l'une est la source de l'énergie dans le corps. Je ne parle pas ici de la source blanche, cristalline, féminine, maternelle, protectrice et aimante de la Sagesse, mais de celle, verte et rouge, sauvage, dangereuse, brûlante, animale, hot chili Pepper de la puissance de vie qui nous anime tous, et au départ de laquelle nous retournerons dormir dans l'obscurité, ou peut être danser ailleurs.

    Lingam et Yoni sont ces puissants dieux que les chrétiens qui rêvaient d'émasculation, comme Origène, ont diabolisé, au sens propre, sous la forme du bouc, ou de l'âne, et de la grotte maléfique grouillant de serpents et de chauve-souris.

    Rand, dans son éblouissante réaction vitale contre le diable voleur et redistributeur, est caricaturale, schématique et incomplète. Certes.

    Mais pas plus que les images pieuses d'un Jésus dégoulinant de sucre, alors qu'il n'a cessé de se battre contre le mensonge.

    Au fond, le message est le même : méfiez-vous des menteurs et des parasites, des prêtres et des beaux parleurs. Sortez de l'hypnose et de l'ombre propice à toutes les manipulations.

    Cessez de mentir, car c'est exactement à l'endroit du mensonge qu'est le rivet de la chaîne de votre esclavage.

    Chassez les intermédiaires et les marchands qui ne respectent pas le contrat initial, divin : l'échange à parts égales, en toute franchise, les yeux dans les yeux.

    En cela, le commerce et l'amour sont semblables : l'absence d'intermédiaire et la plus grande pureté sont indispensables.

    L'actuelle prédation, le viol et la torture des peuples par les puissances d'argent au nom des valeurs démocratiques n'est pas un échange, chacun le voit clairement.

    C'est le mal à l'état pur, jouissant de sa pauvre et terrifiante puissance et de son ignominie, exultant de sa violence et de son pouvoir qui, contrairement au lingam, ne créent rien, et contrairement à la yoni, sont inféconds et stériles, brûlant tout sur leur passage.  

    Tournez-vous vers la Source de Vie, et surtout, ne laissez plus aucun mensonge s'interposer entre Elle, et vous.

    Il n'y a qu'un seul endroit où l'on puisse vaincre l'Ennemi : en nous. Renoncer à mentir, à quiconque, à soi, aux autres, c'est tuer le mensonge.

    C'est simple.

    Lorsque les voleurs, les menteurs et les profiteurs auront disparu dans le royaume des Ténèbres d'où ils procèdent, faites ce que vous voulez de ce qui vous appartient légitimement depuis l'Origine.

    Loin de cette triste farce en voie d'écroulement, car nul ne peut prospérer sur le sable diviseur, reprenez enfin votre place, et votre rang.   





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  • Mon père était un homme cultivé, qui avait lu, dans sa jeunesse.

    Quand j'eus près de 30 ans, et lui 28 de plus, j'essayai de l'intéresser à des continents qu'il ignorait totalement, et qui me passionnaient : Guénon, Jung, l'alchimie, le shivaïsme.

    Peine perdue.

    Quand il se retrouva coincé sur un lit d'hôpital, pour une prothèse de hanche, il lut ou relut Tacite, Hérodote, Rabelais et Montaigne, Alexandre Dumas, d'où il conclut qu'il avait bien fait de ne pas avoir ouvert d'autre livre trente ans durant.

    Les momies parlent aux momies. 

    Il y a mille façons de lire, et des millions de livres. Lire et relire (lege, relege) un seul livre comme le font les Juifs, les Musulmans et les Protestants peut suffire à l'émancipation, comme à l'abrutissement définitif.

    Vivre dans un certain temps, comme le XXIème siècle, et ne pas avoir lu certains livres, alors qu'ils étaient disponibles, c'est presque une faute.

    Permettez-moi de vous conseiller l'acquisition et la lecture des ouvrages d'Ayn Rand, dont j'ai lu deux, à quelques années d'intervalle : "la Source Vive", premièrement, et ces derniers jours :"Atlas Shrugged", d'abord traduit "la Grève".

    Ce dernier, encore plus que le premier, pourtant puissant, inoubliable, étant une bombe à multiples étages.

    Cette œuvre traduite tardivement en français est réputée par la pensée dominante être un hymne au libéralisme, et en justifier tous les excès. Une ode au matérialisme, dit-on aussi.

    Comme on a dit de London qu'il était matérialiste, alors qu'il a écrit l'un des plus beaux livres "spiritualiste" : le Vagabond des Étoiles.

    Ayn Rand, c'est l'Ennemi ultime, pour une gauche parasitaire et pleine de haine, craignant d'être blessée à mort par cette épée de feu, crachant sur elle son venin comme autant d'eau bénite, exactement comme un monsieur valls impuissant tente de conjurer les soulèvements populaires et libertaires grandissants par des accusations frénétiques d'antisémitisme, des mots vides et puants et des descentes de police.

    Dans les deux cas, rien n'est plus faux, rien ne démontre plus clairement la pensée magique. Face à la réalité d'une tempête, rien ne sert de se mettre un bandeau, des boules Quiès et de multiplier les exorcismes.

    Ayn Rand, juive échappée enfant au communisme, réfugiée aux Etats-Unis n'a pas chanté les vertus de la mafia libérale, pourvoyeuse d'injustice et de malheur, comme on le lit ici et là, mais la liberté de faire, la joie d'exister et d'être soi-même qui en constituent l'inverse absolu.

    Il y a là quelque chose de Nietzsche, debout sur la montagne.

     Elle n'a pas dénoncé la générosité ni la complémentarité, mais le vampirisme social, la turpitude et la voracité des incapables et des improductifs, et surtout l'exploitation tant du génie et du travail que celle de la misère par un système politique mafieux de redistribution mis au profit de manipulateurs et de parasites infiltrés à tous les niveaux, toujours plus lâches et plus âpres au gain. 

    La culpabilisation constante des créateurs de richesse, des inventifs, des gens qui travaillent, qui croient à leur utilité, et donnent leur énergie, leur mise sous tutelle, qui se vérifie par exemple aujourd'hui d'une façon évidente par le nombre croissant de fonctionnaires chargés de contrôler un nombre chaque jour diminuant d'agriculteurs, ou par le pillage des peuples par les états et les banques. 

    Elle a un talent confondant et une plume acérée, Mme Rand, réduisant en bouillie dès les premières pages les cervelles habituées aux perfusions de verveine.

    C'est un guide pour les égarés, en ce temps d'appauvrissement planétaire, tant matériel qu'intellectuel. 

    Vous pensez bien que je ne pouvais pas avoir lu un truc aussi énorme (1 255 pages quand même)sans vous en entretenir. 

    Ne vous laissez pas rebuter par ce que le discours officiel, celui des gentils socialistes en dit. Qu'Alan Greenspan est un fervent disciple d'Ayn Rand.   

    L'église catholique se dit et se disait servante du Christ, mais en 1526 fulmina contre la traduction de la Bible en français, pour garder son emprise sur le peuple.

    Loin d'être un hymne à l'égoïsme, c'est un traité sur la liberté, le courage et la purification du désir.

    Un roman passionnant, vivant et éclairant, dont j'aurais pu citer presque chaque page.

    Amis, lisez ce livre, lisez aussi si vous le voulez "la Source Vive", belle méditation sur le génie et la médiocrité, et pensez-en ce que vous voudrez, sans tenir compte de l'avis des promoteurs de la pensée, payés pour maintenir le troupeau dans son enclos.

    Mais, s'il vous plaît, ne faites pas comme mon père qui, à l'âge où il aurait pu renouveler son horizon, et vivre des aventures, a préféré se replier prudemment vers le déjà connu, sous sa tente.  


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  • Nous parlions de l'évolution présumée de l'humanité. Certains signes peuvent plutôt laisser croire à une involution : vous souvenez-vous de l'ordalie, ou jugement de Dieu ?

    Dans lequel celui qui prétendait être pur du crime dont on l'accusait pouvait aller à mettre sa main dans un brasier, pour la ressortir vierge de toute brûlure ?

    Pensez-vous être capable, vous, ou croyez-vous que je le sois, moi, de croire à ce point à la force de l'innocence pour que nous nous y risquions ?

    Vous peut-être. Des rats qui se déchirent sous le regard médiatique, lequel a gardé un reste d'honneur ?

    Certains se réjouissent de ce qu'ils considèrent comme un triomphe de la raison sur l'obscurantisme.

    Ce sont parfois les mêmes qui se désolent de la corruption généralisée de l'humanité.

    A laquelle nul n'échappe, puisqu'elle est l'air qu'on respire, vicié, l'eau qu'on boit, souillée, l'éducation à laquelle sont soumis les enfants, abusés.

    Vivant au siècle de la pourriture, nous y participons tant soit peu.

    La seule voie qui reste pour ne pas y sombrer, c'est, par une volonté déterminée, aidée et guidée, d'accumuler en nous-mêmes la puissante vertu intérieure, en cercles concentriques, jusqu'au noyau demeuré intact, ainsi que des graines.

    Quand le fruit pourri tombe, les graines, seules restées pures, éclosent, se nourrissent des derniers sucs du désastre devenus nourriciers avant de s'enraciner dans une nouvelle terre.

    C'est, me semble--t-il, le seul choix qui dépende de nous : se laisser submerger et dissoudre par la pourriture facile et sucrée qui gagne sans cesse, ivre d'elle-même, ou, au contraire se densifier peu à peu autour de ce que nous sommes vraiment, dans l'attente patiente et sans hâte de la fin, qui pour nous et ce qui demeurera, sera le début d'un nouveau cycle.

     


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    A l'école, on apprenait que les messagers de Charlemagne, je crois, étaient nommés missi dominici, les envoyés du maître.

    On parlait beaucoup des anges, aussi, du grec aggelos, de la racine gar, crier, parler. D'une manière humoristique, entrer sans crier gare est un oxymore.

    L'ange était envoyé du ciel pour établir une communication, avertir, mettre en garde.

    Les hébreux les nommaient mélek.

    L'ange est un être spirituel, une présence presqu'indiscernable dans le quotidien, mais dont le poids peut être écrasant, comme le savent les lecteurs des dialogues avec l'Ange.

    Le new age s'est emparé du sujet pour vendre de l'encre et du papier, et les badauds enthousiastes ont conclu toutes sortes de traités avec des entités comme si tout ce qui grouille derrière les murs du visible était bon, généreux et plein d'amour.

    Une larve peinte en blanc reste cependant une larve.

    Et une larve humaine qui n'a pas le courage de bouger son cul et compte sur les anges pour se sortir de son bourbier reste une larve au cul de plomb.

    C'est tout le problème du magicien noir qui enrôle des entités crapuleuses pour faire du sale boulot à son profit de lézard : sa puissance ne l'élève en rien, elle l'abaisse.

    Il existe une autre sorte d'envoyés, dont personne ne parle : nous, les hommes.

    Envoyés nous sommes, d'un autre monde, en celui-ci. Si les anges prennent la peine - car c'en est une - de descendre jusqu'à notre compréhension (l'intellect supérieur) dans le rêve, la vision, l'audition, l'imagination, l'élan du coeur, c'est parce que nous sommes cousins.

    Eux servent de relais entre le haut d'où nous sommes venus, et ici, ici-bas, comme disaient les anciens.

    N'oublions pas que nous aussi sommes des envoyés, des messagers, des voix. Selon notre nature profonde, selon le souvenir qui nous reste au coeur, nous pouvons parler et dire des mots de paix, devenir, être et demeurer bienveillants, refuser d'entrer dans les spirales descendantes, les relations dégradantes, les combines de pouvoir, aider, rendre grâces.

    Il n'y a aucune fatalité. Jamais aucune fatalité. Juste le poids du cul collé à la chaise, de celui qui dit : à quoi bon, j'en ai rien à foutre, j'y peux rien, je n'y arriverai jamais. Et de toutes façons, c'est trop tard.

    Ce qui peut arriver de mieux, dans ce cas là, c'est qu'un ange tire un coup de latte dans les pieds de la chaise.

    Quand l'homme fait ce pour quoi il est venu : prendre, apprendre, dans un sens, et donner, en échange, de la lumière, de la beauté, du courage, de l'espoir, car en toutes choses il y a échange, quand ce cercle est initié, il est plus facile d'entrer en contact avec l'ange, et dans des conditions moins dramatiques.

    Alors se crée, ou plutôt, devient apparente la chaîne qui relie l'esprit à la matière, le non-temps au temps, l'échelle de Jacob.

     

    Publié le 5 février 2012.

     

    Vous voyez, en ce moment, je me repose. Je ressors des vieilleries, je leur fais prendre l'air. Et je travaille pour gagner du pognon avec des gens qui n'ont que des choses sérieuses en tête, et dès que je peux je lis et je joue de ma belle, si belle guitare pour ma belle, ma si belle femme, et pour les anges qui passent par là et qui aiment bien ça. Et les oiseaux, ces malpolis commencent à gueuler leur aubade bien avant que j'ai vraiment envie de me mettre debout, mais ce sont de très bons artistes, alors je leur pardonne, et dehors, ça sent bon la terre humide et le pollen. Partout ailleurs, semble-t-il, c'est guerre et soumission, intimidation, profils bas, coups bas, trahisons, dans un grand cirque où parfois, sous le clown, on discerne un homme, ou une femme égarés.

    Mais ici, décidément, c'est le printemps.


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  • - "Revenez sur terre, M. Rearden ; vous n’êtes pas du genre à laisser les sentiments interférer dans vos affaires.

    - Non, répliqua Rearden avec lenteur, c'est vrai. Aucun sentiment d'aucune sorte".

    Ferris sourit : " Vous pensiez que nous ne le savions pas, susurra-t-il, roublard, comme pour en mettre plein la vue à un complice. Nous avons attendu si longtemps pour avoir quelque chose sur vous. Vous, les honnêtes gens, vous êtes un véritable casse-tête ! Nous savions qu'un jour ou l'autre vous feriez un faux pas et nous l'attendions.

    - On dirait que cela vous fait plaisir.

    - Il y a de bonnes raisons, non ?

    - En fin de compte, j'ai bel et bien enfreint l'une de vos lois.

    - Mais pourquoi croyez-vous qu'elles soient faites ? Nous voulons qu'on les enfreigne. Il va falloir vous mettre dans la tête que nous ne sommes pas des enfants de choeur, monsieur Rearden. Comprenez-moi bien : nous ne sommes plus à l'époque des beaux gestes. C'est le pouvoir qui nous intéresse, rien d'autre. Vous n'étiez que des amateurs à ce jeu-là. Alors que nous savons y faire et vous feriez mieux de le piger. Gouverner des hommes innocents est impossible. Le seul pouvoir d'un État, c’est de mettre les contrevenants hors d'état de nuire. Et quand il n'y a pas assez de contrevenants, on en fabrique. Il suffit de déclarer tellement de choses hors-la-loi qu’il devient impossible de vivre sans l’enfreindre. Qui voudrait d'une nation de citoyens respectueux des lois ? Que pourrait-on en tirer ? Mais si vous promulguez des lois qui ne peuvent être ni respectées ni appliquées, ni objectivement interprétées, vous fabriquez une nation de fraudeurs… Et là, il ne reste plus qu'à en récolter les fruits. Voilà la méthode, monsieur Rearden.

     

    C'est la règle du jeu".

     

    Extrait d'Atlas shrugged, d'Ayn Rand, les Belles Lettres, page 443.


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  • De l'âge d'or à l'âge de faire

    L’âge d’Or, mythe éternel, ressemble un peu à ce que réclamait le bédéiste Gébé, d’un temps que moins de 20 ans ne peuvent pas connaître : « les maisons étaient sans porte ; une pierre fixée dans les champs ne marquait point la limite certaine des héritages (Tibulle)». Tibulle, si toi moins de 2 000 ans, toi pas connaître. 

    L’or constitue à lui seul un autre mythe. L’ AOR hébreu désigne la lumière. De fait, l’AURUM latin a bien des propriétés de la lumière, ne serait-ce que parce qu’il ne se corrompt pas. Il semblerait qu’il ait un intérêt particulier pour un certain type de sauriens qui depuis l’aube des temps cherche à mettre la main dessus, mais ce n’est pas ici le sujet. Restons-en à l’Or, Lumière.

    Dans ce contexte, la lumière également partagée (le soleil brille pour tout le monde) n’a pas de limite. C’est un temps d’illumination, qui évoque l’enfance du monde, mais aussi l’enfance du fœtus non séparé, hors du temps, irradié par les énergies de la mère en fusion. L’âge dort.

    Un peu plus tard, un peu plus loin, un peu plus bas, l’âge d’argent. C’est le temps des raisonneurs. A l’école on apprend la logique, qui va pas à pas et a oublié ce qu’était l’intuition. On dit qu’on apprend par cœur, alors que justement le cœur vient d’être mis au rencart. Par commodité, on installe des clôtures. C’est mieux, chacun chez soi. L’argent brille, lorsqu’il est astiqué, et met les diverses couleurs en valeur. Découverte de la valeur, par comparaison. Si le silence est d’or, la parole est d’argent. C’est l’âge des beaux discours et doctes péroraisons. De la pub.

    Avec l’âge d’airain, j’ai failli écrire des reins, Vénus entre en scène. Waouh. Synonyme de bronze, l’airain est un mélange de cuivre, qui a toujours symbolisé l’amour, et d’étain qui y mêle des nuances de gris. Ces deux métaux ont de remarquables particularités  immédiates : le premier, comme l’or, existe à l’état natif, de couleur rouge, le second émet, du fait d’une forte cristallisation, un bruit semblable à un pleur, à un cri, lorsqu’on le plie.

    L’âge d’airain est le temps de l’amour, et de la guerre. Des pleurs, des cris, du brasier des sens, des chocs de toute nature.

    Chacun ayant ramené (provisoirement, tout au moins) sa chacune, enfin soumise dans son gourbi, comme chantait à peu près Chedid (le père), une fois la paix plus ou moins revenue, il est temps de faire. L’âge de faire. Des enfants, entre autres. Caïn assomme Abel, l’Ami de Dieu, se met de la cire dans les oreilles, et commence à construire des villes et des usines. Comme il a toujours le sang chaud, il fabrique aussi des bombardiers. Des fois que ?

    Quand l’âge de faire se fait vieux, il rouille (l’âge). Bouffé par l’oxygène dans lequel il cherche toujours et encore plus sa survie, il s’auto-consume. Invention de la science et de la médecine, et des curés. (Je fais dans le très raccourci.)

    Il y a alors deux options principales : certains vieillards vont peu à peu glisser du faire vers le non faire, et ça fait généralement des grand-pères et grand-mères que les petits enfants n’oublient jamais. Ils se retirent du monde tout en étant constamment présents, vivent dans des sortes de grottes mémorielles, comparables au ventre d’une Mère cosmique, dans l’Age d’Or retrouvé. D’abord redevenus comme des enfants, allégeant leur substance, ils finissent parfois par retomber en enfance et renouent avec le plaisir de se faire pipi dessus.

    D’autres refusent, de plus en plus irascibles et tyranniques, de céder un pouce de leur territoire et de leur pouvoir. Abdiquer ? Après eux, le déluge. Parfois pendant, à force de laisser monter. Ca finit rarement bien.

    Cette petite fantaisie peut être lue à plusieurs niveaux, me semble-t-il.

     

    Texte publié le 5 février 2010.

    J'y ajouterai aujourd'hui que la suite logique de l'âge de faire, c'est celui de défaire. Tout montre que ce temps est arrivé. Quand ce temps est venu, tout se défait sans effort ni souffrance, sauf ce que notre refus y ajoute.


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  • Nous avons en tant qu’espèce un préjugé extrêmement dangereux, qui est à l’origine de toutes nos difficultés : nous sommes absolument sûrs, sans l’ombre d’un doute, que ce sont les anciens qui sont les plus savants. Ou plutôt, c’était comme ça dans les siècles précédents. Maintenant, la plupart des gens croient que ce sont les savants, comme on dit, les scientifiques, ceux qui ont fait des études et qui ont des diplômes.

    Nous connaissons pourtant bien le proverbe : la vérité sort de la bouche des enfants. Mais nous écrivons vérité avec un petit v, et ça devient une phrase banale que l’un ou l’autre prononce en riant lorsqu’un enfant fait preuve de perspicacité et de naturel.

    Voilà, le mot est sorti tout seul : naturel. Normal, il vient de naître, l’enfant. C’est la même racine. Est naturel ce qui naît. Les produits naturels, c’est ceux que la nature met au monde toute seule avec l’aide et la bénédiction de Dieu. Le coeur des hommes est le bienvenu dans ce processus. C’est quand il ne fonctionne plus qu’avec sa tête, l’homme, que ça se gâte. Il commence à réfléchir à la manière d’avoir plus et que ça tombe tout seul, sans avoir besoin de se baisser pour ramasser, ou alors de faire ramasser le voisin, etc. et quelque temps plus tard, on arrive au système de la pyramide, des fouets et des esclaves. La nature crève sous les poisons, Dieu s’en va, dégoûté, et les hommes se demandent partout comment faire pour sortir de ce bordel.

    Et c’est bien sûr aux plus anciens ou aux plus savants qu’ils demandent des solutions pour sortir du foutoir où eux-mêmes nous ont mis. C’est à ceux qui se sont toujours trompés qu’on s’adresse pour trouver la voie. Incroyable ? Mais vrai, pourtant. Ca s’appelle un cercle vicieux.

    Au lieu de regarder la télé et l’horoscope, il vaudrait mieux regarder nos enfants. Leurs yeux, leur incroyable attente et leur incroyable don d’amour et de tendresse. Attention : je parle des enfants, pas des petits singes dressés.

    Les enfants, évidemment, presque toujours on leur cloue le bec le plus vite possible, justement, pour éviter d’entendre la Vérité, avec un grand V. Ils arrivent tout droit de l’autre côté, ils sont des produits naturels, c’est Dieu qui les balance ici avec les nouvelles les plus fraîches, ils ont des millions de choses à nous dire, à nous apprendre, et surtout, ils pourraient nous aider à sortir du trou.

    Mais non, justement. On ne veut rien savoir. Vite, dès qu’ils arrivent, on leur verse du ciment sur la tête, on les noie dans le béton, pour qu’ils n’aient pas le temps de changer le monde, de le renverser. Car ils sont les seuls révolutionnaires de ce monde. Les seuls qui ne font pas la révolution à leur profit. Ils viennent nous aider, ils nous aiment spontanément, et on les flingue d’entrée. Pas sciemment, non. Pour les transformer en singes, comme nous, et comme on croit qu’il faut être. Des singes bien élevés et bien obéissants.

    La simple vue d’un enfant pas encore transformé en singe fait péter d’un coup tout le système savamment échafaudé des inextricables soucis du monde artificiel qui nous sert de prison, et que nous avons tissé tous seuls, ou que peut-être une grosse araignée tisse autour du monde, ou les deux, peut-être. Elle a réussi à nous convaincre qu’on aurait froid tout nus, et elle nous a appris à tisser notre propre cercueil, où elle peut nous sucer tranquillement.

    Une chose est sûre : les enfants sont le plus grand danger pour les araignées, car la lumière de leur regard et la bombe de leur rire font de grands trous dans sa toile.

    Alors, chers humains englués et passablement rongés et sucés, je vous en conjure, avant que la nuit ne soit complètement tombée, regardez comment sont vos enfants, aimez-les, ne leur clouez plus la bouche, ne les enfermez plus dans ces cages où vous-mêmes avez été cloués par vos parents et ainsi de suite depuis trop longtemps. Chaque enfant qui aura pu sauver une part de nature, donc de la lumière divine, et n’aura pas disparu sous le béton des conventions et des bêtises qui vous semblent pourtant couler de source, la source du béton, hélas, chacun de ces enfants sera une porte ouverte, un trou d’aiguille, un passage vers Dieu qui l’a balancé de ce côté ci pour nous venir en aide.

    Alors, je vous en prie, battez-vous pour que disparaissent tous les vaccins qui les amoindrissent, réfléchissez à ce que vous faites lorsque vous les laissez toute la journée devant la télé ou des jeux de cons, cessez de leur apprendre la politesse. Apprenez plutôt d’eux le naturel, le rire, la joie, l’amour. Même leur colère vaut mieux que vos génuflexions et votre abaissement. Prenez-les dans vos bras, laissez vous aimer par eux.

    Tant de parents que leurs enfants n’aiment pas, et qui se sont toujours refusés à l’amour ! Combien de pères n’ont jamais touché leur enfant ? Tant de parents qui disent : mes enfants ne me parlent pas, ou plus, et qui les ont sans cesse empêchés de parler !

    La télé braille à fond, ils baignent dans les infos du réveil au coucher, et ils trouvent que les enfants font trop de bruit ? Ils hurlent dans les stades et voudraient qu’on respecte leurs indigestions et leurs migraines ?

    Les hommes tournent en rond dans la cage inextricable de leurs soucis, disant : Que faire, mais comment en est-on arrivés là ? C’est simple : on s’adresse toujours au diable pour nous tirer d’affaire.

    Allez-voir ailleurs. Dieu est là, sans cesse, il arrive en petits morceaux à chaque instant, et entier à chaque fois, mais personne n’y fait attention. Non. On le cloue sur la croix dès qu’il arrive, c’est plus sûr. On l’étouffe dans un sac. Et qui nous dit de le faire ? De le clouer sur la croix des vaccins ? De l’empoisonner avec de la bouffe de merde ? De lui fermer le bec pour qu’il ne puisse plus jamais, jamais, jamais dire la Vérité ? De lui faire peur, de l’enfermer dans un placard, de lui taper dessus, de le violer, pourquoi pas, de l’emprisonner à vie dans la télé ? Qui nous pousse à faire ça ?

    Pas la peine de défiler dans les rues, de gueuler des slogans foireux, de s’associer, de se lamenter et d’avaler du Prozac, pas la peine de réfléchir avec nos neurones sous hypnose au moyen de sortir de la cage. Il n’y en a qu’un : regarder ce qui se passe du côté des arrivées.

    Mais ça ne suffit pas. Quelqu’un sait que c’est là qu’est le vrai danger, et l’étau se resserre. Souvenez-vous du massacre des Innocents par Hérode : ça se remet en place. Le clonage, la stérilisation par tous les moyens et la biotechnologie ont pour véritable but de fermer cette porte. Remplacer l’humanité, trop dangereuse, malgré qu’elle dorme presque entièrement. Afin que la lumière disparaisse de ce monde. C’est terrifiant, certes, mais seuls les aveugles peuvent ne pas le voir. Seuls les sourds peuvent ne pas l’entendre.

    Alors avant que la nuit ne tombe complètement, regardez vos enfants, tous les enfants, et surtout cessez de les tuer : ils nous apportent l’aide, le salut, la lumière et l’amour qui nous manquent tant, et que nous cherchons partout ailleurs en pure perte.

    Laissons nous aimer, laissons nous changer par eux.

     

    Réédition du 10 janvier 2010

     

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  • Jean-François Simon, peintre/chercheur à Bayonne, lecteur de de Vieux Jade depuis pas mal de temps.

    Plus tôt :

     

     

     


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    Faire de son mieux, tel est l'un des "accords toltèques", popularisés par Miguel Ruiz.

    En trois lignes, parce que ça me vient comme ça :

    De mon mieux, avec mon corps, mon énergie. Faire l'effort de me lever, de sortir de ma torpeur, et d'oublier que j'avais autre chose, mieux à faire, sans doute, que j'ai faim et que peut-être je n'aurai pas le temps de déjeuner, que j'ai sommeil, qu'à cette heure ci, d'habitude je dors, que demain je dois me lever tôt.

    De mon mieux avec ma cervelle : lire, entendre, soupeser, regarder, tout regarder, ne rien omettre qui serve à la décision, ne pas prendre de décision hâtive, laisser mûrir, passer la nuit, puis relire et faire le point.

    De mon mieux avec mon coeur, car, parvenue au point précédent, la cervelle à force de s'imprégner ne sait plus où aller, que faire de tout cela dont elle s'est imprudemment chargée. C'est au coeur maintenant de peser, mais pas seul. Car le coeur seul est dangereux. Il peut glisser sur un excès de compassion, et donner en fonction de critères qui ne sont pas ceux de l'impartialité. Ne croyez pas ceux qui disent : fie toi à ton coeur. Il faut un conseil entre coeur et tête. Sans oublier le cerveau d'en bas, le coeur des tripes.

    Et soudain la parole ou l'acte justes jaillissent, d'un coup.  

    Et le fruit n'est pas nôtre.

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     Tout est poussière.

     

    Texte déjà publié le 17 octobre 2011





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  • Je vous jure, c'est pas la peine d'avoir marié une ancienne infirmière... Mme VJ ne sait pas vraiment (pas du tout peut-être) ce qu'est ni à quoi sert la prostate.

    Ce qui ne l'empêche pas, lisant Néo-Santé ou Alternative Bien Être de m'asséner d'un ton docte qu'il est dangereux et inutile de se faire enlever ce truc donc j'ignore tout.

    Sauf que j'en ai entendu parler comme du diable depuis tout môme. La prostate par ci, la prostate par là.

    Oh rage oh désespoir, oh prostate ennemie...

    Même mon popa qu'il a eu un concert de la prostate, mais il est pas mort de ça, je l'affirme. Non, il est mort de lassitude, un peu dégoûté de cette planète et surtout des zumains qui s'y agitent, désespéré à sa façon. Mais avant, les toubibs  l'ont bombardé genre Hiroshima au carré pour prétendument le soigner de ce putain de concert qu'il a joué en solo. S'ils ne l'ont pas guéri, au moins, ils l'ont transformé en une sorte de masse jaunâtre arrondie et suintante, sans cils, sourcils ni cheveux, telle une méduse échouée.

    Mon popa, lui, malgré ses rodomontades, c'était un impuissant. Pas sexuellement, non, ma présence et celle de mes sœurs associées à la roide morale de ma moman en témoignent. Mais pour le reste, oui.

    Il ne faisait rien, mais vraiment rien de ses deux délicates mains blanches. Il demandait du secours pour tout, et dépendait toujours de quelqu'un pour tout ce qui avait trait à la matière. Incapable de se servir d'un marteau ou d'un thermomètre, ou de donner le biberon. 

    J'exagère : pour ce qui était d'ouvrir les huitres qu'il adorait, ou les très excellentes bouteilles extraites - sans les secouer, hein ! de sa profonde cave, c'était un champion. Mais pour le reste, zéro. L'amant table.

    S'est parfois fait berner et forcer la main par d'assez vilains bonzommes. Savait pas dire non.

    Quand je l'ai vu sur son lit d'hôpital, comme une bougie de cire d'abeille en train de couler même éteinte, bien que lui et moi on ait eu un peu de mal à se causer de notre vivant, ça m'a un peu vrillé le dedans, et pour pas pleurer, je l'ai engueulé, oui.

    A 80 et des berges, se faire manipuler comme ça pour une prostate que même Mme VJ ne sait pas à quoi ça sert, incroyable. Mais bon, il avait sûrement ses raisons à lui. Peut-être pas vouloir laisser ma moman qui lui tenait la main depuis si longtemps, qui sait ?

    Mais bon, tu quittes un mec normal, blanc, rose, bleu ou même violet par zones, avec les deux jambes de la même longueur, et une semaine après le bombardement, tu trouves un bout de saindoux en train de finir de s'égoutter, suintant, pelé, qui appelle au secours par tous les orifices, dont la bouche indistincte qui peine à prononcer des mots simples, ça peut dégouter d'avoir hérité d'une prostate et surtout d'en refiler l'entretien à la médecine certifiée et sûre d'elle.

    Là, je rejoins Mme VJ.

    Plus tard, je suis retourné voir ce qui restait de mon géniteur. Il m'a dit que les toubibs venaient de lui proposer de durer encore indéfiniment moyennant quelques minuscules holocaustes nucléaires aux frais des contribuables, et qu'il leur avait opposé ce mot magique qu'il a eu du mal à prononcer sa vie durant : NON.  Il leur a dit : donnez-moi ce qu'il faut pour ne pas souffrir, mais laissez-moi crever.

    Ce qu'ils ont fait. Soyez remerciés, messieurs, de ne pas vous être acharnés contre sa vraie volonté.

    Pour une fois, je lui ai dit : bravo, mon popa. T'es un homme, maintenant, un vrai. Je suis fier de toi. Ça vrille aussi un peu les organes, ça ferait piouner* un dinosaure, ce genre de choses.

    Bon, cette prostate ? J'en sais pas plus. Il y a des jours où je pisse toutes les trente secondes, deux gouttes sur le bout des godasses, puis le lendemain, je fais des concours avec l'âne et le chien, et c'est moi qui gagne. Bon OK, je suis le seul à pisser debout, mais quand même.

    Tout n'est pas perdu.

    Mais je suis d'accord avec Mme VJ, si ça se dégradait, je vais pas laisser la médecine hérissée de bombardiers et de scalpels intervenir sur mon corps si vulnérable et qui aime tant l'amour, le vin et les caresses.

    Déjà que les propositions de mammographies, de pénigraphies, de rectographies et autres examens de caca je fous tout ça à la poubelle dès réception, je risque pas de me laisser amputer d'une glande dont j'ignore tout.

    Déjà que môme, on m'a extrait l'appendice, que je lis aujourd'hui que c'était une bêtise incommensurable, je ne sais plus pourquoi (j'ai toujours été d'une indifférence totale à tout ce qui concerne le fonctionnement du corps, des moteurs, des astres, imperméable aux mathématiques, à la physique, à la chimie, donc ces histoires de glandes m'échappent complètement).

    Ce que je ressens, sans l'expliciter ni même chercher à l'expliciter, c'est qu'il y a ici des gonzes qui font tout un pataquès du fait de mourir, qui me semble à moi parfaitement naturel, et même indispensable quand on ambitionne d'être muté, comme moi, des mecs qui voudraient ne pas crever et cherchent à convaincre les autres que mourir est affreux, infect, injuste, abominable, et passent leur temps à essayer de repousser la limite pour profiter de je ne sais quoi qui m'échappe et m'indiffère totalement.

    Moi, prostate, concert, richesse, profit, voitures, foie gras, gonzesses, ce qui brille, dualité et tout le fourbi, je m'en moque. Pire : je vote contre.

    J'ai envie de vivre et d'être en bonne santé, et je fais tout pour, tant que le ballotage naturel m'est favorable.

    Mais j'ai aussi envie de mourir, et de mourir bien, en parfaite santé, c'est-à-dire en parfaite cohérence entre l'abandon et le détachement affectueux, aimant et reconnaissant de ce que m'a généreusement donné la sphère corporelle d'une part, et l'entrée progressive et joyeuse dans cet autre monde dont j'attends, de plus en plus consciemment, l'avènement depuis que la cigogne m'a laissé tomber.

    * piouner, en patois bourbonnais, c'est chialer.  








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  • ZE véry best, OYYEAH, Saint-Cloud, Saint Cloud béret basque ! 

    Pas de doute, c'était vraiment le meilleur, à pleurer de rire. Respect.


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  • Pour Frédérique qui fête ce soir son premier demi-siècle. Champagne, joie, rires, amour et... danse !

     


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  • A tomber :





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  • Comme les puissants keroubim sont devenus à la Renaissance des chérubins, affreux angelots joufflus en couches nuageuses, le dieu Eros dont André Pieyre de Mandiargues disait qu'il "est un Dieu noir" a été dégradé par la Chute qui nous emporte tous en une sorte d'archer dont l'imbécile passe-temps serait d'envoyer des flèches à droite à gauche, quasiment au hasard. Ultime rebond, la publicité qui souille tout l'a ainsi ridiculisé au cinéma pour une marque de glaces il y a une vingtaine d'années.

    La version présentée me semble tronquée; dans mon souvenir, l'une des victimes de Cupidon (la dernière) était un caniche assez hard.

    Eros, dont le nom approche celui d'Eris - la Discorde - est noir car il est souterrain. C'est un principe enfoui au plus profond des ténèbres, et dont la manifestation peut être chaotique et dangereuse. Normal, puisqu'avec Chaos, Nyx, Érèbe et Gaïa, tous engendreurs de monstres, il est l'une des cinq divinités primordiales.

    Du plus loin, il bande son arc pour viser non pas tel ou tel des humains, mais son propre achèvement - il cherche le ciel pour s'y livrer, comme chantait Leonard Cohen.

    Une illustration très claire de ce mythe, et dont je m'étonne toujours que personne à ma connaissance ne l'ait relevé, est l'exploit d'Ulysse de retour chez lui, qui seul réussit à bander l'arc et à traverser l'âme de douze fers de haches alignés.

    C'est à l'évidence une montée de kundalini. Douze désigne aussi bien les vertèbres dorsales (thoraciques, du grec thorax, cuirasse) que les constellations que traverse le Soleil.

    Comme lui, le Soleil (seul oeil), Eros est androgyne, car il est à la fois flèche et cible. Homme et femme. Noir et blanc. Terreur et paix. Rut et fusion. Début et fin.  

    Pour faciliter la compréhension des 33 degrés maçonniques, notons que l'homme est construit sur 33 vertèbres.

    J'ai à plusieurs reprises abordé la question de la purification du désir, que les Grecs classaient en 4 ou 7 états, de Porneia à Agapè. C'est encore de cela qu'il s'agit, et c'est l'Unique Question, la Seule Vraie Quête, dont parlent tous les mythes : faire d'un dragon écailleux et minéral enfoui, noir et puant, en ouvrant sa cuirasse, sa gangue, un être d'amour et de sagesse, une Pierre Philosophale.

    Amour, Sagesse et Lumière sont contenus dans ce mot merveilleux que je vous laisse contempler : 

    PHILO / SOPH / AL

    La succession des sept chakras décrit aussi ce parcours vertical de l'obscurité, de l'enfermement, du sommeil jusqu'à l'éblouissement, que les Grecs ont décrit sous la forme de la déesse Athéna, jaillie du crâne de Zeus. 

    Exactement comme un germe brise la coque de la graine, traverse la nuit de la terre et s'épanouit à la lumière du jour.

    Si le Joyau est dans le Lotus, il est partout : dans ses racines comme dans sa fleur. 

    Eros est un dieu noir. Mandiargues est un auteur parfois insoutenable dans son délire sadique (l'effarant "L'Anglais décrit dans le château fermé", titre allusif à Eyrénée Philalèthe).

    Eros est noir, et une partie d'Eros cherche à le demeurer, à se vautrer dans la noirceur et l'abjection, dragon jouissant de la pesanteur circulaire. La sexualité incontrôlée est riche du pire. Rien ne l'arrête. C'est un grouillement de serpents dans le sang, les larmes, l'urine et les matières fécales, c'est profondément noir, monstrueusement rouge, extrêmement humide, souvent atroce et parfois ridicule.

    L'enfer de Bosch est plein de ces images répugnantes, hurlantes et terrifiantes, quand son paradis n'est que clarté et union.

    L'enfer n'est pas loin, il est contenu dans nos limites. 

    La flèche d'Eros est alors horizontale et son fer ne sait que blesser. Broyer les coeurs ou donner la vie à des créatures mortelles, sont des variantes de la même blessure que dénonçaient la plupart des Gnostiques. Le sexe vulgaire alimente finalement les cimetières et les asiles psychiatriques. 

    C'est lorsque la flèche est tournée vers le Ciel que l'homme sort du cycle des générations, qui ne sont que "bouffe pour la Lune" (Gurdjieff). Que le feu noir du dragon jaillit comme une eau claire et cristalline où se mire et s'embrase le feu céleste.

    C'est le sens (l'un des sens) de l'Ouroboros.

    C'est une porte toujours ouverte, où peu entrent. C'est le chemin des hauteurs, où peu s'engagent.

    La parabole des talents parle de ceux qui font fructifier, selon leur mesure, et de ceux qui enfouissent ce qu'ils ont reçu. C'est encore de cela qu'il s'agit. Enfouir, c'est ne pas travailler la matière de l'Oeuvre, garder le dragon à l'état naturel, en lui rognant quelque peu les ongles pour qu'il soit présentable. Le baisemain à la place du viol. 

    Parmi ceux qui font fructifier leur don, certains produisent beaucoup : ce sont les Saints. D'autres moins : Nous, les affamés de Lumière, qui titubons dans les embruns, l'espérance au coeur. 

    Finalement, une seule chose importe : faire de son mieux.

    Car, à celui qui a, il sera donné.

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    Texte déjà publié le 18 septembre 2011, sorti du placard grâce à Emmanuelle.

     
     

     





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    Vézelay le 22 mars 2014

    Nous étions dans un Vézelay quasi désert le samedi 22 mars 2014. C'était l'équinoxe de printemps, et nous n'y étions venus ce jour précis que "par hasard", sans calcul, comme l'auraient fait des "mages", des "initiés", parce cette date convenait mieux aux participants, dans la simple intention de faire partager à 5 personnes qui n'y étaient jamais venues le choc intime et bouleversant que peut provoquer une immersion de vingt minutes dans la crypte.

    Personne n'en est revenu indemne.

    Moi, pourtant habitué, pas plus. Une énergie fantastique, un nettoyage à fond.

    Un indispensable déjeuner à l'hôtel du Morvan a clos les opérations. Important de satisfaire aux obligations du corps aussi. Mine de rien, c'est au niveau cellulaire qu'a lieu la profonde transformation, donc au niveau corporel. 

    Il n'y a pas de vie spirituelle détachée du corps. Se laisser bombarder les cellules, pour en transmuter les données, oui. Casser sérieusement la graine dans un restau authentique qui transforme de salutaire façon les produits achetés bruts, autour d'agréables flacons (goûtez l'aligoté en carafe, rond à souhait; l'idéal est de demander au serveur anglais quel est le vin à choisir ce jour là, c'est un amateur vraiment sincère, même si le "hot coat de baône" était un peu âpre), et parler à bâtons rompus des ressentis et du fond du cœur de chacun autour d'une belle et ample assiette est aussi nécessaire que de descendre au fond de la matrice.

    Ce fut une journée parfaite. Parfaitement magique. Le ciel fut avec nous. Clément juste avant et après l'immersion, il a soufflé et lavé vingt minutes durant, lorsque nous remontions presque aveugles des abysses, au point d'ébranler la structure de l'édifice.

    Une anecdote : la nuit précédant le voyage, je m'étais dit qu'il serait précieux de trouver une personne qui fasse une photo du groupe.

    Pas nécessaire : nous arrivions à peine sur l'esplanade arrière, là où vivent d'anciens et splendides tilleuls qu'une dame apparut, et nous proposa spontanément de nous photographier.

    Bien sûr, nous acceptâmes et la remerciâmes.

    "C'est moi qui vous remercie", dit-elle "vous m'avez donné l'occasion d'être utile".

    "J'ai 83 ans aujourd'hui", ajouta-t-elle.

     

     

     

     

     





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  • Est-ce que tu m'aimes (dit-il, ou elle) ?

    Est-ce qu'elle (ou il) m'aime encore ?

    C'est :

    As-tu encore faim ?

    Est-ce qu'elle (ou il) va en reprendre encore, ou dois-je débarrasser la table (le plancher) ?

    Oui, c'est cruel.

     








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